Comme dans tout le bassin méditerranéen¹, l’oléiculture est présente et ses fruits intégrés dans le quotidien des habitants.

L’huile, les olives et tous les co-produits font partie intégrante des habitudes alimentaires.

2023, année inflationniste pour l’huile de tournesol ukrainienne, c’est le bon moment pour redévelopper la production locale d’une huile ancestrale.

oilivier

L'Algérie, l'autre pays de l'olivier

Pays traditionnellement agricole, l’Algérie bénéficie d'un climat méditerranéen propice à la production d'une huile de grande qualité. Elle fait partie des dix plus grands producteurs d'huile d'olive derrière l’Espagne, l’Italie, La Tunisie, Le Maroc, La Grèce, la Turquie, la Syrie, … mais elle est absente du top 10 des exportateurs.

L’Union européenne concentre près de la moitié du verger mondial (49 %) dont l’Espagne est le 1er producteur avec 25% de ce verger.

La structure agricole

En 2022, la superficie oléicole algérienne était supérieure à 440 000 ha, soit une augmentation estimée à 34 % entre 2012 et 2022.

La moyenne des exploitations s’étend à 2,81 hectares comprenant 230 arbres et produisent 221 quintaux de fruits.

Sur les 6 millions d’oliviers que compte le verger algérien, plus de 5 millions sont en production avec un rendement de 23 kg par arbre. Un programme d’expansion est en cours. Il prévoit la création d’oliveraies intensives et une augmentation de la superficie irriguée. Ce projet doublerait quasiment la superficie du verger pour atteindre 900 000 ha cultivés en Algérie, en 2024.

Historiquement, la culture de l’olivier est fortement concentrée en Kabylie et dans le Nord du pays. Mais le projet prévoit d’étendre cette culture aux autres régions algériennes.

Les politiques d’autonomie alimentaire algérienne prennent conscience de l’opportunité de culture d’oliviers.

Les chiffres clés du secteur de l'huile d'olive

440000
Ha superficie oléicole en 2022 (+34% entre 2012 et 2022)
2.82
Hectares moyens des exploitations (230 arbres qui produisent 221 quintaux de fruits) 
5
Millions d’oliviers en production avec un rendement de 23 kg par arbre
900000
Ha cultivés en Algérie, en 2024

Les débouchés mondiaux

La consommation mondiale d’huile d’olive s’établit en 2021-2022, à 3,23 millions de tonnes (COI). Elle a quasiment doublé depuis 1990/1991. Mais cela ne représente que 2 % de la consommation mondiale d’huiles végétales !

L’Europe est le plus gros consommateur, mais sa part a tendance à se réduire, passant de 54 % en 2017 à 48 % actuellement.

Part des principales huiles végétales dans la consommation mondiale :

  • Huile de soja : 29%
  • Huile de palme : 35%
  • Huile de colza : 14%
  • Huile de tournesol : 9%
  • Huile de noix de palme : 4%
  • Huile d’arachide : 3%
  • Huile de coco : 2%
  • Huile de coton : 2%
  • Huile d’olive : 2%

Source : USD


L’excellence algérienne

Si l’Algérie est le 8e producteur mondial d’huile d’olive, en revanche, 99 % de sa production est destinée à la consommation domestique. La consommation y est de 6l/Habitant/an et varie selon les régions (En Kabylie : 11l/ha/an)*

 

 

huile-kabylie
Les consommateurs privilégient l’huile de Kabylie qui correspond parfaitement aux goûts des consommateurs algériens, mais pas aux standards de qualité internationaux (bouteille verre opaque ou bidon, pas de plastique, une acidité faible, etc.).

Le célèbre cru de Tablazt dans la Haute Soummam qui fût médaillé à l’exposition universelle de Bruxelles de 1910, les  huiles d’olive de Kabylie âpres des orées forestières des Bibans, celles vert-jade des piémonts d’Illoula, les huiles d’olive lourdes de haute Kabylie aux arômes fugaces de pin et de chêne, les huiles rose orangées de Seddouk, les huiles mordorées du littoral des Babors.

Considérée pendant fort longtemps comme la meilleure, l’huile d’olive des vergers de la Kabylie semble être détrônée par celle de Jijel, avec la compagnie Nutris et sa nouvelle usine d’huile d’olive, voire celle de Sig avec sa variété spécifique, la sigoise, travaillée depuis des décennies par des entreprises comme la Sarl BHS – les Ravissantes.

Une étude menée par le bureau d’études PWC et Immar-Maghreb pour le PASA (Pôle Soummam en Algérie – 2022) révèle que :

  • 99 % des sondés consomment parallèlement d’autres huiles végétales (colza, soja, …)
  • 41 % des Algériens consomment de l’huile d’olive
    • 66 % pour les bienfaits de santé
    • 38 % pour le goût
    • 35 % par habitude
    • 28 % pour des raisons de beauté

Le prix atteint 705 DA/l en Kabylie, mais 813 DA /l dans les autres régions d’Algérie.

  • 74 % des clients se procurent de l’huile d’olive par des circuits parallèles
    • 37 % autoconsommation
    • 23 % par don (économie solidaire)

La marge de la production se réduit à 40 %.

  • 86 % des clients pensent que l’huile qu’ils consomment est de bonne qualité, bon goût et ou bonne odeur.

Cependant, 90 % de la diaspora souhaite des emballages en verre quitte à payer un peu plus cher, alors que les consommateurs algériens trouvent que le prix est déjà trop élevé et devrait être revu à la baisse.


Le secret : une huile d’olive de qualité

Pour se démarquer de la concurrence, il faut produire une huile de très bonne qualité, exempte de défauts. Les producteurs algériens l’ont bien compris. Ils ont banni les méthodes ancestrales pour gagner en productivité, en hygiène et en qualité.

Composition chimique, degré d’acidité, goût, couleur. Tous ces critères permettent de déterminer avec exactitude les critères de qualité d’une bonne huile d’olive. Mais pour les consommateurs algériens, le pays produit l’une des meilleures huiles d’olive au monde.

Plusieurs marques algériennes ont été distinguées à l’étranger, dans des concours internationaux :

  • La marque Baghlia a remporté sa 3e médaille d'or, lors de la huitième édition de l’Athenaiooc, en Grèce.

Hamid Kiared, le propriétaire de cette marque, affirme sur sa page Facebook que « cette reconnaissance internationale témoigne de [leur] engagement à produire une huile d’olive d’excellence, en préservant la qualité et les saveurs ». Dès 2017 celle-ci exportait 15.000 litres d’huile d’olive en Europe2.

huile-qualite

L’huile d’olive biologique a, quant à elle, remporté une médaille d’or au concours international d’huile d’olive biologique à Genève, en Suisse, en 2023. Une nouvelle consécration qui s'ajoute à toutes les médailles qu'elle a reçues ces dernières années Tokyo (Japon), Berlin (Allemagne), Italie, à Oslo (Norvège) et deux fois à Dubaï.

La marque Dahbia, elle vise le marché du bio avec des olives récoltées le matin et triturée l’après-midi.

L’étude** menée par le bureau d’études PWC et Immar-Maghreb montre que les avis divergent concernant la labellisation entre la diaspora et les nationaux :

  • 69 %, optent pour l’indication de la région de récolte du fruit, d’autres (64 %) pour la région de production ou pour la qualité.
  • Tandis que les résidents interrogés, 57 % d’entre eux se contentent de mettre une étiquette indiquant la qualité et la région de trituration.

On assiste à un essor des exportations algériennes de l’huile d’olive. Selon des données du ministère du Commerce, en 2021 ces exportations ont concerné 600.000 litres mobilisés par 78 opérateurs vers 19 pays soit un montant de 2 millions US$. En 2024, il est espéré 5 millions US$.

 

Consommation et bienfaits de l’huile d’olive

L’huile d’olive contient des acides gras monoinsaturés, qui apportent de l’énergie au corps, sans apporter d’acides gras essentiels (Oméga 3 ou 6). Lorsque les olives sont pressées traditionnellement, l’huile une fois décantée, est riche en antioxydants : en cela, elle apporte un bénéfice pour lutter contre les radicaux libres oxydants. L’olive industrielle est pressée fortement puis purifiée de façon à avoir une robe translucide et une couleur stable. Elle n’a plus son pouvoir antioxydant. Elle n’apporte donc pas directement des atouts de santé mais elle permet de cuisiner sans risque (contrairement aux graisses saturées de palme, ou de graisses de bœuf, d’agneau, de beurre ou de crème…). Elle supporte très bien la chaleur, sans se dégrader, y compris pour des fritures (180°).

legumes
Dans tout le bassin méditerranéen, la tradition fait cuisiner les légumes – abondants – dans de l’huile d’olive, ce qui permet à leurs pigments vitaminiques antioxydants d’être solubilisés par l’huile et de gagner en biodisponibilité. Ainsi, mieux vaut une tomate cuite et conservée à l’huile pour profiter de son lycopène ; mieux vaut des carottes cuites et présentées dans l’huile pour profiter de ses caroténoïdes. Et bien sûr, il faut consommer cette huile colorée par ses bons nutriments.

L’Algérie a fait des infidélités à sa traditionnelle huile d’olive en la remplaçant par celle de tournesol. Raisons économiques et de disponibilité … L’huile de tournesol contient des Oméga 6 mais les Algériens en consomment déjà assez. En revanche, elle n’apporte pas d’Oméga 3. Elle est riche en vitamine E, qui contribue à la protection des tissus.

La nutrition étant une question d’équilibre, consommer tour à tour l’une et l’autre reste un bon conseil.

 

Prospective

Le verger algérien d’olivier est en progression avec plus de technicité agronomique : irrigation, organisation, état sanitaire des arbres. Reste à traiter les co-produits, comme il est suggéré dans la conférence de Monsieur BOUSSAA lors de l’Agora des Experts de Djazagro qui recommande d’upcycler les sous-produits oléicoles.

La totalité des produits et coproduits pourrait être valorisée, ceci au grand bénéfice de l’environnement qui, aujourd’hui, subit de grandes pollutions dues aux effluents.

Sources :

Marché de l’huile d’olive Monde, Europe, France – Campagne 2021-2022 – FranceAgriMer

Consommation et production d’huile d’olive en Algérie – PASA – 2022  

1La culture oléicole se concentre à 98 % dans le bassin méditerranéen.

2TSA Août 2023

* Source : El-Watan – 03/04/2022

**L’échantillon ciblé comprend 1737 consommateurs représentant 10 grandes villes, dont 3 wilayas de la Kabylie, 5 grandes zones urbaines, les Hauts Plateaux et le Sud algérien, dont 317 résidant à l’étranger et répartis sur trois pays en Europe (78 %), aux Etats-Unis (10 %) et au Canada (12 %). Côté production, l’opération a ciblé 160 oléifacteurs, dont 70 possédants des huileries modernes, 29 des huileries semi-modernes et 51 des huileries traditionnelles.